Sous les ponts coule l'onde comme coule ma peine,
Se peut-t il mon amour, qu'aussi tu t'en souviennes?
Quel est cet air lointain qui chante à mon oreille,
Apporté par le vent pour que je m'émerveille.

Et ce parfum de miel où se mêle la rose,
N'a-t-il donc point le goût, qu'avait ta bouche close
Lorsqu'elle se posait sur mon cœur fatigué
D'être si loin de toi d'avoir tant navigué ?

Dans les cieux les nuages s'enfuient vers le couchant,
Sans bruit l'ombre s'étend, et le côteau penchant
Ses arbres vers la nuit, se vêt d'un voile de brume
Qui s'étire, se déchire, léger comme une plume.

Dans ton jardin d'amour qui ne veut pas mourir,
Se promène mon âme qui ne sait plus guérir,
Et l'oiseau qui jadis chantait sur la fontaine
Pleure désormais tout bas l'amour en quarantaine.

Qu'as-tu fait de nos nuits, qu'as-tu fait de nos jours ?
Les as-tu sans remord effacés pour toujours ?
Regarde autour de toi, et surtout n'oublies pas
La vie de cet amant qui marchait dans tes pas.