Diastole et systole et surtout la camisole !
Quels sont ces pavillons où des hommes s'isolent ?
N'avez-vous pas de honte à pourchasser les folles ?
D'abord quoi vous dit que ma tête batifole ?
Je ne sais plus, j'étais dans ma forêt tranquille
Bercé dans un hamac, aux tréfonds de mon île
Pressant sur mon cœur pur un bouquet de jonquilles
Repos pour mes yeux qui de tout trop s'écarquillent.
J'étais là comme un dieu accroché sur ma toile
Un douanier Rousseau* le nez dans les étoiles
Artaud me conseillait de naviguer à voile
Mais Camille* avait des vapeurs je le dévoile.
Mes amis chahutaient comme d'innocents diables
C'est tout un continent qui paraissait friable
Friedrich* ne l'avait-il pas nommé l'adorable
Bleu du ciel en suspens sur un sol mesurable ?
J'étais plein de l'hybris, mangeant mon pain d'épice,
De ceux que l'univers voudrait qu'ils s'accomplissent
Et je savais avoir pour moi de bons auspices
Or quand même on m'aura foutu dans cet hospice !
Ô qui dira comment calculer les prémisses
Après le sang versé augurant les prémices ?
Je me fais la belle où je vois de diaprées miss
Oh eh puis j'en ai marre à bas toutes ces rimes !
Qu'on me serve à présent un bon cru de Médoc
Qu'on me donne à manger les meilleurs des médocs !
Con je te dis docteur arrange-moi mes docs
Dérange-toi crétin à moustaches de phoque !
(*avec dans l'ordre d'apparition : le peintre et douanier Rousseau, Camille Claudel la sculptrice, Friedrich Hölderlin le poète allemand, tous un brin « toqués » ou « naïfs », cachant bien leur jeu peut-être, qui sait ?)
Écrit par jacou
L'art alchimique me tue, me transmute, me sublime. J'en renais plus fort, poétiquement. À suivre.
Catégorie : Pensée
Publié le 03/03/2019
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Superbe travail des rimes Georges... comme toujours ! Tu as l'art de la poésie, c'est un régal de te lire à chaque fois MERCI et BRAVO ! Amitiés |
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lefebvre |
"Con je te dis docteur" : j'avais lu "Congédie le docteur" à la première lecture. Merci pour ce texte "name-dropinguisant" ;-) Dans l'avant-dernière strophe, la rime occise du dernier vers est très drôle, je trouve. Le titre est drôle aussi, et triste à la fois, en ce qu'il traduit une intense solitude : on imagine le patient faire cette déclaration au corps médical (qui se confond souvent avec la société elle-même), lequel renouvelle alors immédiatement et sine die ses mesures "curatives"... | |
AdA |
Bravo Jacou pour ce poème qui par sa fin fouette allégrement , la ligne entre la folie et le hors norme est parfois bien mince | |
fee-de-ble |
Il intrigue toujours ce monde de "folie " ou à quel moment l'esprit bascule , et pourquoi on choisit d'enfermer ces personnes qui un jour ont été des génies. Surtout s'ils ne sont point dangereux alors qu'on laisse en liberté les fous criminels qui décident de mener des guerres insoutenables... J'avais une tante ,que tout le monde prenait pour une "folle " pour l'unique raison qu'elle parlait seule ou aux objets ..sauf son mari ! ils ont continué à vivre , isolés mais heureux jusqu'à leur mort ; elle est partie un peu avant lui ... Merci pour ce bel écrit Georges ! |
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Yuba |
Daniel, AdA, Fée, Assia, merci vivement pour vos remarques et vos témoignages ! @ Daniel : je prends exemple sur toi, mon ami qui est poète avant toute chose ! Ensuite, m'advienne que pourra ! Amitiés. @ Ada : entre parenthèses au bas du texte, j'ai suggéré l'hypothèse éventuelle que le narrateur n'était peut-être pas si fou que ça, car il y a dans le passé des possibilités, soit de mauvais diagnostics établis, soit de patients s'étant réfugiés dans un "monde alternatif" que peut constituer la folie. Les biographes de Hölderlin sont partagés sur l'état de folie réelle ou jouée du poète, car Hölderlin fuyait à l'époque une possible condamnation politique pour complot révolutionnaire dans son Wurtemberg, et il souhaitait de plus à titre personnel ne surtout pas devenir pasteur, ce qui était le destin inexorable de bien des diplômés du Stift de Tübingen, avec l'enseignement en université (destin de son ami Hegel). Ailleurs et plus proche dans le temps, le romancier suisse Robert Walzer a passé environ 30 années de sa vie dans un asile, sans qu'il ait été bien établi qu'il ait souffert d'une maladie de l'esprit. Je peux supposer que certains d'entre nous, pour fuite un univers de compétition ou la solitude immense, pourraient probablement se réfugier dans un état second "d'abandon", de "démission", se retirant hors du monde en des asiles ainsi que les moines s'associent dans des cloîtres... Reste bien sûr les contingences notoirement inhumaines des lieux asilaires, qui font douter de tels renoncements et attitudes. Je vous remercie. @ Fée de blé : oui, être "borderline" dit bien d'ailleurs cet état incertain où l'on jouxte la folie tout en maintenant la raison...arraisonnée en fragile équilibre. C'est un état que nous pouvons quelquefois ressentir, au bord du "lâcher prise". Merci ! @ Assia : je te comprends car moi aussi je parle tout seul...à mon chat, qui le pauvre n'en peut mais, alors je miaule à ma façon pour tenter une communication. Tu as raison, la folie sanguinaire coure allègrement dans le monde réel, et sans doute la folie médicale, qui est à la fois plus pacifique mais dangereuse pour qui en souffre, vaut-elle mieux... À titre personnel, la folie m'a très longtemps fait peur, alors j'essaie de comprendre les cas connus de personnes, célèbres puisque c'est d'eux qu'on conserve des témoignages vécus, et les études qui portent sur ces situations : Van Gogh et Hugo van der Goes (peintres), Hölderlin, Artaud, Nerval (poètes), Camille Claudel la sculptrice, et des gens moins connus dont l'Art brut préserve les oeuvres (Séraphine de Senlis, Aloïse, Wölfli...). Merci à toi. |
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jacou |
Georges le titre de ce poème est très parlant en réalité où se trouve la normalité. Certes il y a des gens dérangés mais d'autres peuvent se jouer des personnes qui se prétendent lucides et tout comprendre alors qu'en réalité ils se réfugient derrière des certitudes plus où moins justes. Merci et belle fin de journée | |
roserose |
Merci Rose pour ce commentaire juste. Je suis persuadé que nous avons tous un petit grain de folie que nous laissons s'exprimer dans nos rêves, avec la lucidité désespérée que commande le réveil aux réalités de notre monde. Bonne soirée à vous. | |
jacou |
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