Antonin Artaud est taraudé par un système de nerfs déréglé,
mais, convenant taire ces heures
en quelque asile que la terre ait porté à sa connaissance,
pour, se détournant d'elles,
aller d'une aile froissée se perdre par air et mer,
il engloutit un océan de morphine et d'opium
(les modernes neurotropes ne sont pas à portée).
Tropique du cancer,
il est né sous la maladie dont les signes isolent un ciel mental
se réverbérant dans un entrelacs de stupeur,
toutes plus figeantes à mesure qu'elles développent un réseau neuronal
dont l'instance de divorce d'avec la vie
perce sous l'épileptique comédie humaine,
et d'affligeantes poses par les trajets du corps ;
et, sur la rocade des mots où circulait autrefois une langue agile,
faisant paraître le pantin mystique,
ou bien la marionnette de soi-même que nul n'agit plus
hormis les fils de ses nerfs branchés à des amplitudes majeures,
à d'élégants voltages étranges
où le vertige est l'ange en allégresse
volant à la foudre les onomatopées d'un tronc déraciné,
lui, planté comme il peut,
verdira aux bouts tremblants de ses membres
des feuilles de fines lignes,
soi-disant signées par ses filles imaginaires,
mais certainement saignées de lui
comme les pluies dont on arrose les feuilles mortes
au râteau de la mort tirées.
Écrit par jacou
L'art alchimique me tue, me transmute, me sublime. J'en renais plus fort, poétiquement. À suivre.
Catégorie : Amitié
Publié le 31/10/2020
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Merci pour ce poème Georges. C'est pour moi un être particulier qui m'a toujours perturbé. Je le trouve sublime, sa souffrance me fait peur autant qu'elle m'attire. Même s'il se pensait bloquer, ne pouvant plus penser... Il a crée de grandes choses. Il est dur à décrire. Ton poème est passionné et les images que tu emploies lui vont à merveille. |
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finalement tu sais ce qu'alors on ne savait pas il avait sans doute le copain Alzheimer qui divise ta vie en petits morceaux et te perds sur l'autoroute infinie où tu cherches à aller quelque part la fin est très belle |
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justine |
Artaud visage particulier entre illuminé et Poète maudit | |
CRO-MAGNON |
Comme je ne connaissais pas cet auteur, je suis allé m'informer sur sa vie , et je suis tombé sur un destin douleureux et tragique, dont ta poésie traduit fidèlement l'intensité .Comme cet extrait : " ses déséquilibres mentaux ont rendu ses relations humaines difficiles, ils ont aussi contribué à alimenter sa création. Il y a d'un côté ses textes « fous de Rodez et de la fin de sa vie », de l'autre, selon Évelyne Grossmann, les textes fulgurants de ses débuts... Mille merci Georges pour cette découverte , un auteur auquel je reviendrai...grace à toi ! |
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Yuba |
Un portrait qu'on lit comme un hommage appuyé à Antonin Artaud dans toute la dureté, la cruauté de ce qu'il a eu à subir, mais aussi dans le génie de sa création. Quand on pense à toute la souffrance qu'il a dû endurer, ça fait mal au coeur! J'aime beaucoup quand tu parles de "l'épileptique comédie humaine", ces mots me semblant tout à fait caractériser les soubresauts dont l'humanité se montre capable. Un poème qui a beaucoup de force, et qui fait comprendre combien tu apprécies Antonin Artaud. Merci beaucoup pour la qualité de ton écriture, avec mon amitié toute vive à toi :) |
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Matriochka |
Parler de cette figure de l'exploration des méandres de l'humain, voilà qui s'annonçait des plus malaisés, et votre plume a relevé le défi avec cet esprit d'analyse et de synthèse que j'admire en vous, avec cette connaissance fine de la question également. J'ai dû par le passé, au cours de mes études, lire "Le théâtre et son double", et j'en ai gardé le souvenir d'un rapport à soi et au monde fait de tourment et de décortication. |
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Ombrefeuille |
Très bel hommage. Merci Jacou | |
Vermeil |
Justine, Olivier, Assia, Matriochka, Ombrefeuille, Vermeil : je vous remercie d'avoir témoigné que vous appréciez cet hommage à un très grand poète, le dernier de la tradition des "maudits", débutée avec Nerval, Verlaine, puis close avec lui. La souffrance et l'écriture poétique, un thème qui me parle énormément. Artaud, également, rendit hommage à un autre souffrant s'exprimant en peintre : "Van Gogh", bouclant une boucle solidaire entre les "toqués". | |
jacou |
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