"Du verre qui casse à l'écho de quel cri ?"*…
Ce n'est rien, j'essuie, j'essuie toujours
au fond de ce café enfumé.
Je fais couler la bière comme un parfait croque-mort
et sers les croque-messieurs avec la même morgue.
Le tabac et le bruit brassent ensemble
un tourbillon qui s'accroît d'heure en heure.
Qu'ont-ils donc tous là à statuer sur leurs sièges ?
Ils assaillent la salle, brouillent les miroirs
qui ont grandi les lieux à la taille d'un temple,
lieu du babil désaccordé du temps.
Peut-être encore le dernier endroit où on veuille le perdre,
tel un portefeuille d'actions à la baisse,
porte-avion de ceux qui n'ont plus de liens pour leur amertume.
A se mettre sous la dent les mots du soir :
crimes, femmes, régimes, grosses légumes, mômes, travail...
Tout est pour mon âme de Sardanapale à napalmiser.
Nous, créatures, moutons jusqu'au licou,
oisillons d'or et jargonautes de l'internet,
que nous reste-t-il à nous dire,
sinon à nous casser d'une plus pure liqueur ?
J'ai mis les bouteilles cul par-dessus tête :
je n'attends plus que l'orgie finale des gosiers
et des gorges que l'atmosphère n'aère plus.
Et le pastis jaune assez pour imager
sa prochaine ruine au caniveau.
Non, Jason, Jonas, aventuriers du néant,
fuyants des lieux noyés par gloriole,
vous tous que je sers,
vous m'êtes les bouteilles à la mer
que je lance tous les soirs,
avec vos gueules de mélanges et de sabordages !
*vers de Robert Desnos
Écrit par jacou
L'art alchimique me tue, me transmute, me sublime. J'en renais plus fort, poétiquement. À suivre.
Catégorie : Amitié
Publié le 29/01/2020
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C'est mieux qu'un film ! J'ai lu à haute voix , pour bien m'imprégner de chaque mot et sa place judicieuse dans la phrase qui elle, résume le décor, l'ambiance, les émotions aux visages et au final les connectivités avec l'aversion touchante du narrateur , parfaitement intégré dans son milieu de travail, de vie ... Il est si séduisant ce texte par tout ce qu'il laisse d'humanité et d'humilité en moi ...un favoris Georges ! |
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Yuba |
Toute une ambiance saisissante grâce au débit de bons mots qui vient naturellement sous ta plume. Pour moi ce sera un déca, et puis je reprendrai bien de ta superbe poésie aussi. Merci chef ! et surtout bravo | |
Ombellune |
Une vision sans concession du milieu assez particulier des cafés, débits de boisson, et de leurs piliers de bar. Vous êtes étonnant de vérité, Georges, en cafetier désabusé dans sa vision de la vie, toutefois réaliste. Je ne vous cache pas que le premier vers de la première strophe (après le vers de Robert Desnos) m'a fait penser à la chanson "Les amants d'un jour" d'Edith Piaf (Moi j'essuie les verres au fond du café...). Et je pense que vous savez que le mot "bistro" est d'origine russe ;) Lorsque les cosaques stationnés à Paris en 1814 allaient au débit de boisson et voulaient être servis rapidement, il disait "Bistro! Bistro!" au cafetier, ce qui voulait dire "Vite! Vite!" (et ce qui se se prononce plus exactement en russe avec le "i" presque "oui" et le o presque "a"). C'était un plaisir de lire ce poème, merci beaucoup. Avec mon amitié :) |
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Matriochka |
sublime et intéressant jacou avec cette ambiance particulière amitiés:) | |
romantique |
Pour ton bon poème, pour la dive bouteille, je lève mon verre en ton honneur ! | |
CRO-MAGNON |
Bonsoir, Servir, entendre, écouter, voir, ne rien dire en un Lieu où le Monde se refait, où les Discussions sont vives .. Senteur particulières, reconnaissable entre toute les Yeux fermés .. Je m'assoie à la petite Table du fond : observer et boire .. une Eau plate ! Lys-Clea |
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Lys-Clea |
Merci à vous six qui êtes entrés dans ce bistrot, troquet d'âmes en perdition, et en êtes sortis avec vos ressentis que la communication est tout, la solitude une tristesse infinie... Les cafés ont une fonction sociale, ils devraient être remboursés, du moins certaines boissons conviviales et non alcoolisées s'entend ! Je plaisante certes, mais j'aime les cafés pour ce liant qu'ils permettent, le temps d'une consommation. Bon dimanche à vous tous ! | |
jacou |
Georges J'ai apprécié ce poème Dans les petits villages d'antan ces bistrots existaient et les gens se regroupaient devant un verre de vin ,un café parfois une goutte d' eau de vie de cidre bon ils ne ressortaient pas toujours bien droits mais leur vie était rude alors ils trouvaient une compagnie, un endroit pour échanger, se raconter. Heureusement ils n'avaient pas de voiture maintenant il faudrait se contenter d'un petit café. J'aimerais m'y installer avec un verre d'eau gazeuse et écouter discrètement Je suis persuadée que j'en repartirais avec des ressentis ignorés de moi-même. Belle fin de journée à vous | |
roserose |
Merci vivement Rose pour vos lignes précieuses car elles rappellent cet art des cafés bien français, cet art des conversations aussi de même où se distinguent l'esprit national, qui est d'échanger jusqu'à plus soif ! Belle journée à vous, que la matinée de ce jour dans son aube vous sourie. | |
jacou |
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