La nuit est ténébreuse avec sa lune pâle
Le vent souffle un torrent gelé, sec, inquiétant
Les feuilles sont fouettées par la bourrasque mâle
Avant de s'envoler dans les cieux gémissants

Là-haut sur la colline une maison ancienne
Solitaire, esseulée, trône superbement
Une dame l'habite et refuse que vienne
Le moindre visiteur, fut-il fort élégant

Elle a dans son jardin une petite chienne
Attachée à sa niche où l'usure du temps
A fait quelques dégâts, laissant traces vilaines
Sur le toit défraîchi que noie le firmament

Les vitres du logis sont humides et sales
Ici et là des pots de terre ou en ciment
Abritent maintes fleurs aux senteurs vespérales
Qui donnent des couleurs au cadre déclinant

Dans le salon fané frétille une bougie
Qui tremblante éclaire les meubles poussiéreux
Sur la table de bois une nappe jaunie
Supporte une fiasque de rosé sirupeux

Les murs sont lézardés, la peinture écaillée
Près l'âtre refroidi un fauteuil camaïeu
Est depuis bien longtemps la place préférée
De la propriétaire au visage cireux

Une chatte grise s'y prélasse amusée
De voir jouer l'ombre dans les coins anguleux
Avant de s'assoupir la queue enfin calmée
Sous le regard patient du miroir en bois vieux

A même le parquet madame est endormie
Avec sur tout le corps des insectes visqueux
Qui glissent en bavant sur sa chair alanguie
Et lui sucent le sang dans un silence pieux