Une musique triste coule dans mes oreilles
Et je vois, fataliste, se couvrir le soleil
Des nuages du réel, des nuages de conscience
Et il tombe du ciel comme des larmes d'enfance

Les copains inventés, les histoires racontées
Les empires fabriqués, les châteaux de papiers
Sont les ruines d'une époque où régnait Légèreté
Au royaume loufoque des dessins et des jouets

Et l'on voudrait garder pour toujours en mémoire
Comme un ciel bleu d'été qui ne fait que pleuvoir
Des rayons de sourires et des perles d'amour
L'insouciance des rires, les copains dans les cours

Mais les billes ne roulent plus sur les plaques d'égouts
Et les filles ne jouent plus les deux mains dans la boue
Elles se peignent les lèvres et le bout de leurs doigts
Des talons les élèvent, elles perdent tout éclat

Les garçons se déguisent footballeur ou chanteur
Apparaissent des frises sur leurs crânes de crâneurs
L'apparence est cruciale quand on a quatorze ans
Il faut rester normal en étant différent

Les histoires à dormir n'endorment plus maintenant
Et l'idée de vieillir qui chemine lentement
C'est la prise de conscience, comme un réveil brutal
C'est l'âge d'adolescence, le chaos théâtral

Les esprits grandissants qui débordent de questions
Les Pourquoi, les Comment, les incompréhensions
La colère et l'envie d'une vie différente
De celle qu'on nous prédit, de celle qu'on nous présente

Et les filles qui abiment les coeurs innocents
Perchés haut dans les cimes des sentiments naissants
C'est le monde qui s'effondre quand elles vous font danser
Seul au milieu des ombres des amours effacés

C'est le monde qui s'effondre pour un sourire manqué
C'est le monde qui s'effondre à chaque soleil couché
On invente les Toujours, on invente les Jamais
On apprend les amours, et puis les amitiés