On peut pas vraiment dire qu'on choisit son lieu de naissance
C'est ce que vont découvrir petit à petit les cinq sens
Moi un jour mes parents ont décollé d'Argenteuil
Et des portes de la ville ils ont franchi le seuil.

J'viens de là où les abris d'bus remplacent les cages d'escaliers
J'viens de là où la capitale est un pays éloigné
J'viens de là où on copie le style et le langage des banlieues
P'tét parce qu'on se sent isolés, et p'tètre un p'tit peu envieux
J'viens de là où le FN racole pas mal nos grand-mères
En 2002 on à rien vu mais depuis on laisse plus faire.
Chez nous y'a pas grand chose à faire que jouer au foot le week-end,
Dire aux petites soeurs de baisser le son quand elle écoute des boyz-bands.

J'viens de là où le troc fonctionne encore, et même de mieux en mieux
Où t'échanges encore un service contre du lait ou des oeufs
L'ANPE ici atteint ses chiffres record
Va pas croire qu'on est blindé, on s'rait vite en désaccord.
Ici on mesure pas la richesse à la Porsche ou au Hummer,
Mais à la supérficie de tes terres et la puissance du tracteur.

J'viens de là où se déplacer n'est pas vraiment un cadeau
J'viens de là où pour un premier rencard tu fais vingt bornes en vélo
J'viens de là où on aime le rap, cette musique qui transpire
Qui sent le vrai, qui transmet, qui témoigne qui respire!
J'viens de là où les teufeurs squattent les champs des nuits entières
J'viens de là où c'est pas Sarko mais Johnny le plus populaire.

J'viens de là et j'kiff ça malgré tout ce qu'on en pense
A chacun son territoire à chacun sa France
Et si je rends hommage à ses lieux à chaque expiration
C'est que c'est ici que j'ai puisé toute mon inspiration

J'viens de là où on taf en ville malgé les heures de transports
Faut dire que l'économie chez nous a stoppé net son essor
J'viens de là où la ville bruyante donne envie d'appeler à l'aide
Et le soir on rentre en souriant, retour quotidien au bled.
J'viens de là où les riches parisiens prennent résidences secondaires,
On les crame vite au marché, à l'accent et l'allure fière.
J'viens de là où ils flippent la nuit quand leurs voitures font naufrages
C'est vrai que chez nous l'éclairage public s'arrête aux bords des villages

J'viens de là où tu croises peu de sourires on dit bonjour en grognant
Mais dès que tu tends la main, tu vois des coeurs acceuillants.
Chez nous on attend l'été pour sortir les barbecues,
Et se réunir tous dehors pour parler de ce monde fou.
J'viens de là où à certains endroits tu captes aucun opérateur,
Mais moi le portable c'est quand il marche bien que j'ai peur.
J'viens de là où des fruits gratuits poussent encore sur les arbres!
J'viens de là où on tue poules et lapins sans trouver ça macabre.

J'viens de là où comme ailleurs on est déconsidéré
De temps en temps un bouffon demande en riant si on a l'éléctricité,
On en veut souvent aux parents d'être venus se perdre ici,
Alors on part faire des études et puis bosser à Paris
On a souvent de la famille qui habite dans une banlieue
Et des fois même on s'y installe simplement parce qu'on s'y sent mieux
Moi c'est l'odeur de la terre qui me manquait depuis longtemps
Alors j'y suis retourné, mais les soces' manquent assez souvent.

J'viens de là et j'kiff ça
[...]

J'viens de là où comme partout quand on dort on fait des rêves
J'viens de là où des gens naissent, des gens s'aiment des gens crèvent
Tu vois bien là d'où j'viens c'est pas le pays des gens heureux,
Et que le terme pour nous désigner le plus souvent c'est bouseux.
J'viens de là où à tort on aime pas trop dire d'où on vient,
Peut-ètre un complexe un peu bizarre de pas être né citadin.
J'viens de là où si tu te perds t'auras sûremment un peu la frousse,
C'est ici que j'ai grandi, que je me suis construit,
J'viens de là cambrousse.