Ne vous offusquez pas de ma maladresse, et si je vous dérange Monsieur
Si l'envie de vous montrer à quel point vous êtes prétentieux
Vous chatouille et vous braque contre moi, je n'en ai que faire
À dire qu'ici les Hommes n'ont plus faim, ou qu'ils ne font pas d'effort
Vous insultez tous les vaux rien, tous les sans pain qui font de ce peuple un trésor.

Je vais vous raconter ici la gueule qu'a la misère
Alors ouvrez en grand vos cadenassées œillères.

J'ai vu dans les rues infernales, un cadavre vivant accroché au trottoir, aussi maigre qu'un os, aussi blanc que le noir de la mort
J'ai vu un gamin jouant au gros dur comme d'autres jouent à la poupée, se fracasser sur un mur dans une voiture volée
J'ai vu Jésus et un lapin parler… dans un hôpital psychiatrique où le sens des vies ne rime qu'avec rien.

J'ai vu l'orgueil des yeux brillant d'argent voler un gamin mendiant
J'ai vu une femme donner son corps pour qu'un homme répare son ordinateur
J'ai vu la montagne et la mer et la forêt en sanglot dans mes yeux
J'ai vu la montagne et la mer et la forêt, la beauté dans mes yeux
J'ai vu la paresse d'une vie ronger l'être fabuleux
J'ai vu la maladie rompre les liens entre le cerveau et le corps
J'ai gouté à l'impossible, à l'irréel, approché le mystique dans un tango.
J'ai vu l'os, brut, le squelette, casser sous nos peaux.

Baisser donc la tête monsieur, vous qui connaissez
Et qui pensez que l'on avance en suivant les chemins
Seuls les pas dans la jungle tracent les plus beaux destins
Vous n'avez rien vécu
Pour croire que vous savez, alors qu'il y a tant de complexités
Parlez, continuez donc à vous offusquer
De ces cris de colère qui viennent de la misère
Parlez, parlez, mentez pour vous convaincre
Et peut-être que dans un de vos froids discours
Vos mots ne serviront plus à remplir le vide
Mais à écouter quelques-uns de ces vains soupirs.