J'ai rencontré un vieil arbre, il était majestueux pour son âge
Le chêne pédonculé était là, au coin d'une cour de ferme
Sereinement, témoin du temps qui s'enfuit, il me raconta
Dans à peine trois cents ans, j'aurai tout juste un siècle
Qu'il avait connu tous les vents, au plus félin des animales
Au plus câlin, tambourinant ses branches de mille éclairs
Aux doux rayons d'hiver lui réchauffant les entrailles

Qu'il avait vu tant de passereaux prendre leur envol
Des générations s'éloignant dans le glauque de l'aurore
Il se souvient encore des têtes blondes, se glisser au creux
De son tronc, faisant leur cabane sous des rires glorieux
De mes bras tortueux, mes bougeons hument encore le printemps
Et sous la lumière chatoyant, je redeviens d'un beau vert naissant
Mon feuillages couvert de rosée, réveille tous les papillons dès l'aube
Au soir les oiseaux enfin reviennent, me solfiant des histoires d'eaux
De leurs épopées sur la toile de mes souvenirs, j'aurai tant à vous conter

Il me confia, qu'il avait vécu jusqu'ici sans connaître l'ennui
Curieusement il se sentait étourdi d'une lointaine nostalgie
Qu'il pleura parfois son jumeau, disparu un soir d'hiver d'ouragan
Qu'avant du haut de sa cime, il percevait l'écume des océans
De ses charpentières il guidait les étoiles sur l'écaille des rêves
Maintenant, je ne suis qu'un pauvre épouvantail aux joies incertaines
Le lierre enchaine mon fut, m'étouffant en cet endroit d'une vie délaissée
Les bâtisses qui m'entourent, de leurs toits viennent face à moi à s'écrouler
Ici, habite une vieille dame, elle me rend visite chaque matin, me console
De nos deux jeunes coeurs, ensemble nous récitons les chants du rossignol

Ramie