Tu as mis les voiles en berne.
Elle ne te bernera plus.
Insidieuse, elle était partie pour mieux revenir cachée en toi, là où on ne l'attendait pas. On ne sait jamais sur quel pied danser. Tu ne pouvais déjà plus le faire que sur un seul. Petits orteils partis au-delà du rivage. Ta rage en avait fait de même.
Voilage de jais sur la rivière où coulait ton essence vermillon. Comme cela aurait pu être mignon (moignon) en d'autres circonstances. Ton sang a coulé de nombreuses fois ces derniers temps.
A quand ta dernière coupure avec le monde ?
Chaque fois plus profonde. Chaque fois monte pas à pas au plus profond de toi : Handicapante.
Elle franchit un cap en te faisant dévaler la pente. Tu ne réussirais plus à remonter…
Tu perdais pieds, ta jambe… Et remonte en toi la douleur. Perds tes forces.
Ton cœur t'a lâché, toi qui ne manquais pas de courage.
Les rouages ont cédé.
La pompe s'est arrêtée de te pomper toute ton énergie.
Fini.
Maladie des petites douceurs, j'espère qu'elle a eu raison de toi en une douce heure.
Un week-end saint, qu'il le soit pour les tiens.
Tu es reparti avec les cloches. J'entends celles de l'église. Glisse les voilages sur mon âme en repensant à ce que tu fus :
Un homme digne.
Un léger souffle dégage les voiles.

Mon visage.

Ta barque glisse sur le sang qui a coulé. Ta douleur qui s'est libérée avec une partie de toi. Découpe de ton être comme des tranches de vie. Tu n'avais plus que le goût du sang, plus celui de te battre contre ce couteau qui s'abat sur toi
Encore une fois.
Tu fais battre la mesure en moi. Tambours qui vous accompagnent vers l'autre rivage.
Une brume vous accueille. Mes yeux se brouillent. Vous franchissez cette autre destinée : vide ou jardins verdoyants. Vers où doivent aller les vivants en ces instants où le temps même s'arrête pour vous laisser partir tranquillement.
Mes voiles ondulent par une légère brise. L'onde vous emmène loin d'eux. J'ai le cœur léger car un papillon aux ailes déployées est à sa place dans mon cœur.