C'est la couleur d'effroi
La douleur est du froid
Je vois cette merveille
Dans sa teinte vermeille
Et je comprends mon cœur
Qui a quitté le chœur
Des trois étroites pierres
Où courait un long lierre
Et qui est le vestige
D'une plante sans tige
Plantée en pleine orée
De la sombre forêt
À tel point qu'elle occulte
Une table de culte
Gisant là comme autel
Des démons un hôtel

Est-ce que l'âme évite
Si fuyant courant vite
Le sort abominable
Dont le bois est capable ?
Je me sens aux abois
Au milieu de ces bois
Sortir n'est plus possible
Un hibou pris pour cible
S'affale au bas d'un arbre
Je ne suis pas de marbre
Je sens qui me pourchasse
Un grand dieu de la chasse
Et fuis dans les buissons
Emettant de grands sons

Tous les animaux fuient
C'est ma chance aujourd'hui
Je ne veux pas mourir
Manger dormir et rire
C'est ce que je veux être
Le monstre va paraître
Ma course est trop hagarde
Plus rien je ne regarde
Qu'aux lointains les blés mûrs
Si la forêt m'emmure
Si elle me dévore
Je veux tenter dehors
De crier qu'on la brûle !

Je sens un lent recul
De la chose en poursuite
Lorsque soudain la fuite
De grands daims effarouche
Les lièvres sous les souches
C'est le bal animal
Je pousse un cri primal
Et saute dans le vide
Du fossé intrépide
Dans un grand tintamarre
J'atterris dans la mare
Tous les canards du coin
M'ont vu venir de loin
Ils m'ont fait de la place
Dans la boue que j'embrasse

Boue qui est mon trésor
Car j'ai pris mon essor
Hors des futaies maudites
En druide d'Aphrodite
La déesse est furieuse
Je tiens serrées les yeuses
Que j'ai là-bas cueillies
Au secret des taillis
Reste à les broyer mortes
Sinon les dieux cohortes
Du mal vont s'introduire
Et le soleil nous fuir !