Nous avons quitté les hauts lieux de notre enfance
Les jardins sacrés de notre folle espérance
Pour nous élancer parmi les champs de blés mûrs
Le monde est splendide et vaste aux moissons d'Assur !

Dans nos rues circulent des soldats courageux
Qui servent un roi dur tel un métal précieux
Leurs yeux noirs brillent des mille feux des conquêtes
Le Grand Roi poursuit dans tous les pays sa quête.

Tigre et lion sont frères dans nos jardins divins
La nature entière est pour nous ample festin
Le chat qui rôde est pareil au lion qui rugit
Il passe en fraude où la bête dévore et gît.

Nous, petits hommes, tremblons la perte d'Empire
Et circulons le jour en priant par ce dire :
"Nina ! Dieu de l'orage ! Epargne-nous la chute
Nous qui avons gravi la montagne du culte*

Régnons sur les terres qui sont les plus fertiles
Protège-nous de ces Perses qui tant rutilent !
Barbares aux portes de notre grand Royaume
Sur le point de fondre parmi nos toits de chaume !"

L'Assyrie est la terre aux beaux fleuves d'argent
Tigre et Euphrate s'y mêlent, eaux, triomphants
Mais je pressens déjà des jours de grands combats :
L'on voit des camps perses à moins de mille pas !

Grive de suie chantant les jours de ta passion
Indique-nous d'autres terres par ta mission
Vole ! et quitte la ville aux cent portes fermées
Je te suivrai d'en bas avec ma tendre aimée !

(*la montagne du culte désigne la grande ziggourat d'Assur, temple des dieux de la cité)