Une seule lettre s'échange,
et le lien de la correspondance prend une autre tournure.
Comme on s'était appelé après s'être souri l'un à l'autre,
ce sourire est devenu grimace
et l'on passe d'hôte de l'autre à l'état de rat.
Secrète altérité,
combien sécrètes-tu de ces sensations qui ont abusé notre sentiment après un simple regard,
maintenant étiolées en lettres sur du papier qui fut parfumé,
mais dont les pattes de mouches révèlent l'odeur rance nouvelle,
sans plus ces trépidations du coeur
qui nous faisaient courir sans cesse vers le point final
- grand orgue d'âme -
sans jamais l'atteindre,
s'il n'était que les feuillets tombés prennent fin
et nous laissaient au dénuement d'une absence,
strip-tease d'un être cher de l'orteil à l'âme,
vers quoi transcendance et immanence opèrent
(vertige dansant ou vestiges d'encens ?)
Là où tu te mires,
à l'état de la lettre qui n'est plus ce miroir de ton ego
que tu sus franger en esprit,
car elle dessinait la frontière de ton double
et mettait en tous tes états une révolution dissolvante,
vois maintenant ce bloc à noter au lieu du vélin supérieur
- elle était ton étoile, tu lisais ton destin.
C'est ainsi parfois que le beau cygne plongeant
voit fondre l'éclat luisant de sa plume
bientôt bien trop mouillée
pour servir encore l'image signifiante :
dès lors perdant le sens
(ce qu'on est bête en amour...),
on conjoint autrement les choses et leurs mots.
Rendus aveugles - à ce qu'on dit -,
les yeux n'ont pas vu l'entrelacement des lettres à l'avenir,
estompant le "signe" au profit du "singe",
le visage amoureux se décompose,
et laissant à part l'être sur lequel il n'est plus de prise,
il fait paraître son muet aspect ricanant,
signe que jamais elle ne fut éprise,
que d'un seul corps de lettre plus signifiant que le tien.
Écrit par jacou
L'art alchimique me tue, me transmute, me sublime. J'en renais plus fort, poétiquement. À suivre.
Catégorie : Divers
Publié le 08/06/2014
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Ce sont là de vrais pièges,,,,, parfois | |
flipote |
Merci, très chère flipote, pour ton commentaire. Cordialement. |
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jacou |
Merci très cher jacou pour ce superbe poème libre ! A travers cette correspondance, c'est tout le drame de l'amour mourant que vous nous laisser percevoir : lorsque débarrassé de ce voile aveuglant on se rends compte que non seulement l'aimée n'est pas telle qu'on la voyait, mais (ce qui est pire) qu'elle n'éprouvait de sentiment que pour une image idéalisée qui ne nous correspond pas. J'aime particulièrement le dernier vers de la première strophe, qui résume si joliment ce sentiment. Bien à vous. Florent |
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Florent |
Voilà le piège dévoilé et écrit avec toute sa vérité! merci à vous pour cette belle écriture et aussi ce talent qui décrit avec justesse et précision combien le mal existe. Cordiales pensées; CRIS |
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CRIS |
Merci à vous, très chers zeste, Florent et CRIS, pour vos commentaires précieux ! Cordialement. |
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jacou |
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