À l'aube tu bois de cette eau salubre au bord de la berge. Le saule trempe son feuillage et pleure un frère déraciné. L'aube pleut en rosée fine sur tes cheveux de jais, parsemant le pré de sa brume. L'étoile est pâle, et déjà le jour paraît fuir l'automne qui s'obstine.

Tu approches à pas de louve en ta neuve innocence. Tu es sœur de la prairie esseulée dans un décor candide. La rivière flue parmi les fleurs rouges comme ta robe. Ne l'enlève pas où la contrée entière disparaîtrait à mon regard.

Le soleil perce enfin la neige des nuages en troupeaux et s'impose de rayons qui font vaciller la poussière dans ce matin fermant la saison, ouvrant à l'hiver une carrière dont sourd le fatal essor au gré des vents fraîchissant, qui s'imposeront désormais.

La cascade de cheveux sur les collines de tes épaules est tout mon paysage. Que m'importe un pays où j'ai mes racines, quand près de moi tu as jailli de la charmille ? Le réveil matinal appelle la nature aux travaux des moissons, les blés mûrs élevant leurs épis à peu de distance de nous, tout debout avec un tremblement d'amants tendres.

Rien ne sépare ma main de la tienne, donnes-la moi et filons à l'anglaise au gré d'un pays où le thé se sert à cette heure.