La Reine se reprenait.

Elle jouait de ses mots, de ses bras et de ses pieds, elle déjouait les règles d'un art qui pour certain est considéré comme passé, elle était la Muse de chacun, elle passait d'un mot à un autre, d'une réplique à une autre avec une aisance sans pareille.

C'était comme si grâce à elle, Molière, Shakespeare, Marivaux revivaient de leurs cendres, se posaient à mes côtés et encourageaient leurs propres œuvres, leurs propres ascensions, leurs propres couronnements. Elle était les trois, les six. Et elle savait ce qu'elle faisait.

Et puis elle était partie, la scène s'était assombrie, la salle était devenue noire et un tonnerre d'applaudissement avait retentit, le rideau s'était baissé.

Elle était revenue accompagnée d'une vingtaine de personnes, mais de toute la pièce, je n'avais vu qu'elle, je n'avais entendu qu'elle, je n'avais senti qu'elle.
Je n'avais voulu qu'elle.
Elle était si belle dans sa robe d'autrefois et son maquillage qui la rendait encore plus brillante encore qu'elle n'eût jamais été.

Elle pleurait.

Elle avait le sourire.

Elle savait toujours combiner les contraires.

Elle agitait la main frénétiquement, se baissant encore et encore, remerciant le public.
Mais moi, c'était elle que je remerciais.
Hormis le travail qu'elle avait dû fournir pour en arriver là, je la remerciais d'avoir mis toute son âme dans ce spectacle et de m'avoir transportée dans une autre réalité.
Une réalité plus douce, plus belle. Une réalité où elle brillait pour moi.

Mais ce soir-là, l'étoile qu'elle était explosa pour finalement s'éteindre peu de temps après.