Où que j'aille les murs me suivent, à la même allure, avec les mêmes silences las et la même usure.

Où que j'aille mes pensées se répercutent en échos qui se muent en vacarme, contre ces murs aux silences las et la mine dure.

Dans les espaces clos ils me laissent un répit, ils me toisent d'un silence las. Est-ce moi qui l'imagine, ce regard vide plein de mépris ?

Dans un train de nuit, dans une bulle en mouvement qui dilate les ressentis, je croise une fée au silence las, à l'œil cerné fatigué de rêver.

Sa beauté est magnétique, celle d'un tableau du monde où les archétypes luttent avec démence pour colorer sa peau et émouvoir son cœur.

Le nectar de sa jeunesse est visible dans tous les traits passionnés de son visage, mais les ombres d'un vieillesse prématurée viennent nuancer cette baie sauvage, dont les assauts d'un doute introspectif ont drainé la vitalité.

Elle vagabonde avec ses propres murs, l'enclos procédurier de tous les artistes.

Sa clé est une baguette, sa baguette est un crayon. Sur le papyrus fané de son cahier elle étend son espace, se donne le champ libre pour respirer.

Ses yeux sont absorbés par le monde que déploient ses doigts assurés, l'architecte se ménage un paysage d'ombres et de lumières, de passé et d'avenir, dont les trésors font pâlir l'environnement alentours.

Sur les coins jaunis du cahier, la fée déploie ses ailes et sa pensée, laisse dériver une note qui se change en sonnet.

Mes pupilles sages et mornes ont décelé une sœur d'âme, j'éprouve curiosité et compassion et mon attention se tend, mais les mots s'encombrent à l'embouchure de ma gorge, et les murs se rapprochent pour sceller le tombeau.