Elle l'a tant aimé, tellement attendu,
ce fut son premier homme, son premier amour
elle n'avait que vingt ans et n'avait rien vécu
il l'a cueillie comme une fleur dans les labours
prête à s'épanouir au milieu des décombres
d'une enfance trop proche pour en être guérie...
Il était sa lumière et puis cette part d'ombre
ce nuage toxique de l'épaisseur d'un cri
qu'elle croyait partager avec cet homme là...
Ils étaient tous les deux enfouis sous leurs poisons
submergés de douleurs, ils pensaient se comprendre
mais restaient l'un et l'autre chacun dans sa prison
qui les faisait ramper comme des scolopendres
prédateurs dont les viles morsures venimeuses
les laissaient enfiévrés, chétifs et enragés.
Deux douleurs se combattent et laissent l'âme creuse
le vide sans couleur attirant les aimés
l'un s'accrochant à l'autre en train de se noyer
l'autre se refermant sur son coeur en danger.
Elle a enduré ses absences, ses retraits
admiré ses tableaux d'une âme torturée
comme des galaxies au fond de l'univers,
il lui parlait du ciel, de ses astres dorés
mais ne savait réchauffer son coeur en hiver
pauvre petit Poucet dont les miettes de pains
balisaient des chemins allant droit dans la jungle
inextricable de son âme sans lendemain
éteinte dès l'enfance par des gestes qui cinglent.