Qui saura de combien fut-elle la rêverie
Je n'ai point de mon âme demandé la saisie
Je veux vivre, et pour bien, je veux être aimé
Mais quel est cet amour qui n'est encore ailé
Il est un et parfait, et elle seul le pourvoit
De son ventre divin coulent voiles de soie
Sa beauté grandissante en de modestes âmes
Ronge mon fond et ma foi que lentement elle affame
De ma laide existence, de mon triste voyage
Je n'ai su rien de grand, et n'ai su rien de sage
Tout ce qui de ma voix trouva de la valeur
N'avait pour le commun que le goût de la peur
Et à l'aube d'un être que je devins bientôt
J'eus l'or d'une rencontre et en fus bien sot
Les amours ne seront que les clameurs charnelles
D'un poète fantasque, aux mémoires, éternel
Le récit de ma vie enchainée à cet ange
Vous tirera sans peine, des maux de cette fange
Vous apprendrez alors qu'elle fut et demeure
L'objet de mes passions et de mes sombres rancœurs
Je l'aimai dès l'instant ou je sus qu'elle m'aimait
Et pour n'avoir connu que le corps et les plaies
Des anciennes conquêtes trop offertes à moi
Je sombrai à jamais et toujours m'y emploie
Lorsque enfin d'un cœur, je me vis abreuvé
Cet or nourricier il me fallut garder
Je voudrais celui-ci jurant devant le ciel
N'appartenir qu'à moi, et ne me faire querelle
Pour qu'au tombé de l'astre, au déclin du jour
Je me sache enrichi d'un éternel amour.