D'où je suis ? Qu'est-ce que j'ai à moi dans ce monde trop vaste ?
Bien sûr, ici, nous n'avons pas les cimes coupantes et lointaines de l'Oural;
Celles-là mêmes qui tombent dans la blessure profonde d'un grand glacier,
Une Pergame toute de fleurs, piquée d'un pavé d'andésites en douce fractales,
Des muscaris d'Arménie, et le long voyage du James Caird qui s'était égaré.
Nous n'aurons pas ces interludes de campagnes à l'aube de cent années de siège,
Qu'ont les tours de St-Petersbourg, en cette veille de première neige.
Le monde tourne fort.
Nous avons pourtant ici: des forêts, des îles rondes et ces grands cieux de cobalt,
Les vallées secrètes de Cap-Tourmente qui frôlent l'embâcle de tout un fleuve,
Les mystères d'une Appalaches en perdition, des abbayes subtiles d'où on moult le malt.
Une fleur est cueillit d'une falaise de Blanc-Sablon; elle ira sur ces vestes neuves:
Qu'on met aux fêtes. -vivons pour ces pères qu'on a perdus aux coups de grisous,
Quand ici, dans les rues d'hiver: les coeurs sont gros, et les baisers sont doux.
Soyons fiers de notre terre, et je le dis sans gêne.
Mes rivages de diamants, ont le même éclat que panache les vieilles côtes du Finistère.
Mes berges lointaines ont la brume en drapés d'octobre de l'étrange Baie-des-Chaleurs,
Que Percé est de l'avant-garde comme l'eut été Gibraltar -que survole l'oiseau de Jupiter.
C'est les gens de mon pays qui le rendent si vivant, si chaud et qui avancent sans peur !
Bas-relief sur bouclier de granite, des enfants se font la guerre avec des branches de houx,
Et moi je rêve à la roseraie selon le givre, oui je rêve à l'avènement d'un printemps fou.
Car ici, dans un pesant bois d'épinettes noires, c'est savoir que la neige tombe au ralenti
Sur des années perdues, à l'ombre des vals d'Ungava; ces forêts où plus personne ne va :
Que reste le grand harfang: phare pour les naufrages de janvier, au mirador endormi,
Dans l'écho d'un ravage: le dernier combat, près d'un lac, de deux cerfs en fracas.
Un fin lardoire me pique au coeur les traits d'un murmure frais, d'une aquarelle blonde
Que les enfants d'ici chantent en histoire, assis dans l'eau, sur le quai du bout du monde.
Et c'est bien là, c'est doux et loin, sous les cyprès, au nord du 45e parallèle,
Que tout se passe. Qu'on aime et qu'on vit, qu'on trouve que la lune est encore belle.
Nos forêts flottent sur des milliers de kilomètres, des millions de silences,
Et nos maisons, sur les sourires, les espoirs et les jardins de patiences...
Le monde tourne fort,
Ça entre dans les os.
Le monde tourne,
Et c'est beau.
Écrit par Biron
\'\'La poésie est une maladie du cerveau\'\'
Catégorie : Divers
Publié le 27/01/2016
|
Poème Précédent | Poème Suivant |
Divers à découvrir... | Poèmes de Biron au hasard |
Annonces Google |
Un grand merci, Biron, pour cet ample poème gorgé de mots, de sons, de lieux qui nous font voyager en de grands verset dignes de Cendrars ! | |
jacou |