Michel-Ange as-tu peint dans la haute coupole
La création d'Adam qu'un seul doigt divin frôle ?
Dans sa discrète majesté, Dieu se retire
Pour laisser à l'homme le souci de choisir,
Le voilà seul, abandonné dans son berceau
Lui qui voudrait de son modèle être jumeau,
Mais exister ne peut être simple fusion,
Il faudra pour aimer vivre en séparation.
Est-ce la tragédie causée par l'élection,
La confiance reçue devient-elle un fardeau
Si lourd à supporter pour les générations?
Chacune recevra un unique flambeau
Qui devra éclairer ce grand espace vide
Et ce noir infini où l'effroi se dévide
Pour tenter de combler l'écart pourtant infime
Qui l'éloigne à jamais de son père sublime.
Michel-Ange as-tu peint dans la haute coupole
La gloire de ce Jules, un césar en étole,
Féroce conquérant, bénissant les épées,
En intrigues, savant, et aux mœurs déréglées ?
Qui rendit à Rome sa gloire et son éclat
Surpassant son rival l'autre César Borgia
A tel point que son doigt trempa dans tous les vices
Et qu'il en contracta l'abjecte syphilis.
Ainsi médité-je sur le sort de la louve,
La cité éternelle aux fabuleux prestiges
Aux palais arrogants tout en stuc et vertige
Et ses basiliques où des martyrs s'éprouvent,
Aux artistes fameux qui tant la glorifièrent
Des piliers de Bramante qui soutiennent St Pierre,
Thérèse en extase sculptée par Le Bernin,
Ou la vierge à l'enfant que Léonard a oint.
Puis, viendra en son temps, le bouillant Caravage
Dont le Christ chancelant va désigner l'apôtre,
Dans cette obscurité qui hante les visages,
La main du fils de l'homme voudrait trouver la nôtre.
Et pourtant la splendeur de la ville immortelle
N'aura pu effacer les intrigues cruelles,
Si l'âme s'élevait dans les hautes coupoles,
Des corps agonisaient au fond des sombres géôles.
L'ordre des Capucins m'aura enfin confié
De l'illustre Rome la simple vérité,
« Nous étions comme vous, comme nous vous serez ».
Ainsi s'adressa-t-il à mon cœur perturbé.
Chapelles, sculptures n'étaient plus qu'osselets
Habilement sertis dans ce long sanctuaire,
Etait-ce l'ironie de tant de vanités
Qui venait rappeler là notre fin dernière ?
Squelettes insolents au sourire éternel
Au cœur de la cité qui se croit immortelle,
Tout comme ces gisants figés dans leur prière,
Dans ma crypte, j'attends cette ultime lumière.
Écrit par Banniange
Il faut habiter le monde comme un poète
Catégorie : Histoire
Publié le 02/06/2021
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quelle merveille ! | |
justine |
Merci Justine. | |
Banniange |
Bonsoir, Si l'On se penche sur tant de Chefs d'Œuvres , l'On se rend compte du Côté Lumineux ou sombre de toutes ces Mains d'Artistes .. ils ont penché leur Ame, sur le Religieux, l'Etre, les Symboles .. etc .. laissant ces Merveilles, qui depuis, fascinent nos Regards .. C'est ce que je ressens à lire ce Texte ! Bravo ! LyS .. |
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Lys-Clea |
la main du fils de l'homme voudrait trouver la nôtre | |
justine |
Puissant ! A l'image de la peinture de Michel-Ange, justement ! J'avoue ne pas priser ce style (je préfère grandement les icônes et fresques de Byzance, de Moscou ...), je trouve qu'une richesse de sens inestimable se cache dans cet espace laissé entre le doigt de Dieu et la main de l'homme. On pourrait écrire longuement au sujet de cette distance qui laisse libre. Je salue votre réflexion quant à l'histoire de la papauté (là aussi, il y a de quoi étudier, de quoi écrire encore), et je pense de plus en plus que si l'Eglise Catholique est encore debout après toutes ces turpitudes, c'est sans doute une preuve de sa solidité, de sa pertinence, de son enracinement vrai dans l'esprit-même de l'Evangile, car si elle n'était pas bel et bien telle que cela, il y a longtemps qu'elle se serait écroulée, les désordres humains l'ayant emportée alors dans leur spirale descendante. Là aussi, je sens qu'il peut y avoir un petit débat ...;) |
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Ombrefeuille |
L'émotion en levant les yeux vers ce chef d'oeuvre est inexplicable ...vous venez d'écrire une raison à cela ... Magnifique merci |
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MARIE L. |
C'était Banniange, du coup, j'ai pas su corriger quelques coquilles... | |
Banniange |
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